Dans mon métier, le communiqué de presse est un des outils les plus utilisés pour diffuser un message. Toutes les organisations savent ce qu’est un communiqué de presse et utilisent abondamment cette tactique! Nouveau produit, nouveaux professionnels au sein d’une équipe, invitation à une activité bénéfice, rappel des étapes d’un projet, participation à une conférence, alouette!
Pourquoi continuer à diffuser une tonne de communiqués de presse dans un contexte de multiplicité des canaux de communication? Les journalistes sont souvent au fait des nouvelles, vues sur les médias sociaux, bien avant qu’ils ne reçoivent les communiqués traditionnels.
La relation journaliste-relationniste
Les journalistes reprochent souvent aux relationnistes de maquiller les messages des organisations pour toujours présenter le beau côté des choses, réduire les risques de dérapage, etc. J’ai souvent entendu des journalistes dire qu’ils préfèrent recevoir des communiqués de presse un peu nébuleux et mal ficelés directement des organisations que de recevoir des communiqués de presse rédigés avec la langue de bois… où les relationnistes ont complètement édulcoré le contenu pour préserver la réputation de leur client. Je suis tout à fait d’accord avec les journalistes sur ce point. Les relationnistes ont plusieurs responsabilités face aux médias dont celle de produire du contenu de qualité pour leurs clients et qui est d’actualité et pertinent pour les journalistes.
Il faut aussi prendre en compte, en relations publiques, la notion de « storytelling » c’est-à-dire la capacité de créer des histoires intéressantes avec ce que l’on souhaite mettre en valeur. Histoires vraies bien entendu! Il s’agit en fait d’identifier un angle intéressant à notre sujet et de le proposer à un journaliste intéressé par la question. Pierre Gince, un relationniste établi, a d’ailleurs publié un excellent billet sur cette pratique.
Ce qui a fondamentalement changé, c’est la façon dont les communicateurs doivent maintenant définir et proposer leurs sujets de couverture de presse. Tant mieux ! En effet : le temps pour les longs « pitchs » à des journalistes est révolu. Le communiqué pour tous, aussi.
Les médias sociaux et le communiqué de presse traditionnel
L’utilisation massive des médias sociaux permet aux spécialistes des communications de varier les tactiques de communication pour diffuser un message. Il n’est plus nécessaire de diffuser un communiqué de presse pour tout et rien!
Ouverture d’un nouveau magasin de designer au centre-ville? Pourquoi ne pas inviter une gang de bloggeurs à vivre une expérience exclusive (SVP, ne leur envoyez pas un communiqué de presse pour les inviter! Cette parenthèse ouvre un sujet tout à fait intéressant sur les relationnistes et les bloggeurs. Voir un billet rédigé par Emmanuelle Rouillard-Moreau). Filmez ensuite quelques moments-clés de l’évènement et diffusez le tout sur les médias sociaux. Vous souhaitez qu’un journaliste parle de l’ouverture de la boutique dans le quotidien de la place? Faites vos devoirs en identifiant un journaliste qui aime la mode et invitez-le à participer à la soirée VIP avec la gang de bloggeurs.
Un autre exemple : le fameux rapport annuel d’organisation. Une landing page sur le site Internet corporatif, résumant le bilan annuel, plus quelques interactions avec des journalistes ciblés sur Twitter (avec qui on entretient déjà une relation), une vidéo bien réalisée avec le mot du président… et l’information sera probablement traitée par les médias au cours des jours suivants… en plus de permettre aux autres internautes d’en prendre connaissance de façon dynamique.
Les mots-clés et l’importance de ne pas utiliser la langue de bois
Même si je suis encore convaincue de la pertinence d’avoir recours à l’utilisation des communiqués de presse lorsqu’il y a une nouvelle porteuse et intéressante – et quand ledit communiqué est bien rédigé – il n’en reste pas moins que les médias sociaux et le web imposent maintenant des changements dans la façon même de rédiger. Si avant, les relationnistes pouvaient se permettent, dans les communiqués, d’enrober la réalité avec des mots politiquement corrects, ils se nuisent maintenant avec le recours à cette pratique.
Imaginons un instant que la direction d’une entreprise manufacturière mette massivement à pied, d’une façon un peu cavalière, des employés avec plus de 30 ans de services. Pendant que les employés et la population se déchaînent sur les médias sociaux, l’entreprise diffuse un communiqué de presse laconique dans lequel la direction exprime tout son regret pour cette « diminution forcée des effectifs ».
En plus de dégager l’impression que la direction n’est pas reconnaissante du travail effectué par ses employés dévoués, ce qui n’est franchement pas un bon positionnement pour une entreprise, le recours à ces mots aura un autre effet pervers. Croyez-vous que, pour avoir plus d’information sur l’événement, les gens de la place taperont sur le web : « diminution des effectifs entreprise ABC »… ? Ben non! Les citoyens taperont : « mises à pied entreprise ABC » ou « fermeture entreprise ABC »…
Ce qui sera alors disponibles sur le web : les prises de positions des opposants. L’entreprise elle – qui devrait avoir comme désir que son contenu et ses explications soient lus par le plus grand nombre possible d’internautes – sera complètement absente du web… Pas très bon pour faire passer un message. La morale? Avec le web, il faut parler des vraies affaires pour être lu… parce que les internautes, eux, cherchent de l’information avec des vrais mots et non des mots politiquement corrects!
Des fois, on dirait que les grandes organisations sont des forces d’inerties et rechignent beaucoup à utiliser de nouvelles méthodes. Comme si ça s’apparentait à prendre des risques dans une période où ils ne souhaitent pas s’en rajouter sur les épaules.
Le bon vieux communiqué de presse, c’est du connu… c’est moins insécurisant que le web!